L’accordéon garde encore son image d’instrument pour les bals de village. Cette idée préconçue n’est pourtant plus au goût du jour. Depuis le début du XXIème siècle, il occupe une place de plus en plus importante dans le domaine de la musique classique.
L’accordéon, un instrument du souvenir
L’accordéon évoque les bals musette et les airs folkloriques traditionnels qui s’ancrent dans nos mémoires. Pourtant, il ne faut pas réduire son rôle à ce type de répertoire. En effet, depuis le début du XXIème siècle, cet instrument à vent s’impose dans le monde de la musique classique. Pourtant, souvenons-nous qu’en 1830, dès son apparition, l’accordéon était très présent dans les salons bourgeois. Il est donc passé d’instrument noble, tourné vers l’opéra, à un instrument populaire, plutôt ringard en seulement quelques décennies. D’après l’accordéoniste Pascal Contet, c’est lorsque Napoléon III a abdiqué que cet instrument est parti en désuétude.
Un instrument qui renaît de ses cendres
Tel un phœnix, l’accordéon a su se réinventer. Il a fallu attendre les années 1990 pour qu’il retrouve sa place dans le monde de la musique classique. C’est seulement au début des années 2000 que les compositeurs s’y sont intéressés de plus près et qu’ils ont reconnu son potentiel. Depuis ce moment, on constate un boom de l’accordéon : les compositeurs ne voient plus de limite entre le savant et le populaire, les barrières tombent. L’un des obstacles majeurs était l’absence de classes d’accordéon dans les conservatoires, ce qui n’est plus le cas depuis 2002. Les plus jeunes qui découvrent la musique s’intéressent également à cet instrument, sans crainte d’avoir l’air “has been”.
Les ères baroques et contemporaines
Même si l’accordéon est un instrument relativement récent, les joueurs peuvent s’attaquer sans faille à un large répertoire. D’après Vincent Lhermet, accordéoniste, il est possible de jouer toutes les œuvres composées entre le XVIIème et la première moitié du XVIII, en lisant simplement la partition “telle quelle”. Toutefois, le répertoire romantique résiste à l’accordéon. En effet, la plupart sont des œuvres pour piano indiquées pour l’utilisation de la pédale. Etant donné qu’il n’y a pas de résistance avec l’accordéon, il convient de rallonger les notes, ce qui est un exercice fastidieux.
Actuellement, les accordéonistes peuvent jouer un bon nombre d’œuvres contemporaines depuis l’engouement récent des compositeurs pour l’instrument. Un retard qui s’explique simplement par le fait qu’entre 1960 et 1980, les recherches musicales étaient plus centrées sur les notes électro acoustiques, c’est pourquoi l’accordéon était vu comme un instrument désuet.
Tchaïkovski : en avance sur son temps ?
La plus ancienne pièce de concert composée avec des accordéons est Thème varié très brillant pour accordéon, écrite en 1836 par Louise Reisner. Puis, le célèbre compositeur russe, Piotr Ilitch Tchaïkovski, a alors inclut quatre accordéons diatoniques optionnels dans sa Suite pour orchestre n°2. Enfin, le compositeur italien Umberto Giordano a inclu l’accordéon dans son opéra Fedora en 1898. Néanmoins, le premier compositeur a avoir composé uniquement pour l’accordéon chromatique en 1921 est Paul Hindemith.
La place de l’accordéon en France
Aujourd’hui, l’accordéon est largement utilisé par les artistes français, qu’il s’agisse de chanteurs de variété comme Patrick Bruel, Yann Tiersen, Claudio Capeo ou de groupes alternatifs. En outre, certains groupes de rap (Java) se sont appropriés l’instrument à vent. Ce n’est pourtant pas étonnant. Après avoir acquis une certaine noblesse, l’accordéon est enseigné dans les conservatoires depuis les années 1970, bien qu’on ait pu constater un manque d’élèves.
L’accordéon reste un instrument de la mémoire
L’accordéon n’est toujours pas perçu comme un instrument moderne et on s’imagine un papy jouer dans un bal musette. On pourrait le qualifier de couteau-suisse, comme l’indique si bien Vincent Lhermet. L’accordéon est ancien et moderne, tout en étant joyeux et nostalgique.